lundi 22 mars 2010

Burundi : le fanatisme politique gagne du terrain


(Syfia Grands Lacs/Burundi) A l'approche des élections de mai prochain au Burundi, le fanatisme politique gagne du terrain et joue sur le travail, les affaires et l'intérêt collectif. Mieux vaut être du parti au pouvoir et en respecter les consignes.

"En tant qu’instruit, je ne saurais pas reculer devant un document utile à moi et mon entourage voire à toute la nation. En particulier des livres qui ne comportent aucun cachet politique," répond un préfet d’études d’une école de la province Ngozi au nord du Burundi, à une lettre de demande d’explications de son directeur. Celui-ci lui reproche d'avoir accepté des livres donnés par un parti politique à leur école. Lui-même les avait refusés, car venant d'un autre parti que le sien. Le préfet, issu de la société civile, ainsi que des élèves, avaient reçu ces livres dans un cadre privé.
Malgré l'appel lancé par le président de la République à la population de vaquer à ses activités, car le parti ne nourrira personne, trois mois avant les élections, des gens, par fanatisme politique, ont du mal à distinguer leurs activités professionnelles et leur appartenance politique. Ceux-ci, issus surtout du parti au pouvoir, le font pour éviter que d'autres groupes politiques gagnent en influence. Leur but est généralement de préserver leurs sièges et de garder le pouvoir "jusqu’au retour de Jésus", c'est-à-dire toujours, comme ils ne cessent de le chanter. Ceci souvent au mépris de l'intérêt général de leurs concitoyens.
C'est ainsi que dans la plupart des écoles gérées par les communes, le manque de livres est criant. "Pourquoi refuser un livre alors qu'il ne parle pas d'un parti en particulier. Et on n'a demandé à personne de voter pour celui-ci", s'étonne une des élèves en âge de voter qui ajoute que, seul dans l'isoloir, on vote pour qui on veut….

Mélange des genres
"Je me demande ce qu'il adviendra de mon chef de service, étant donné que de tels postes ne sont octroyés que sur nomination par les partis politiques et non selon les compétences", s'interroge Bosco qui a reçu de lui une mutation disciplinaire qu'il estime injuste. Il avait refusé d'aller au service pendant la grève comme le faisaient d'autres membres du parti de son chef de service. Il précise aussi que la loi n'a pas été suivie puisqu'il n'a même pas reçu de demande d'explication.
Ces derniers temps, une grande confusion est faite entre parti politique et État. Pour bien vivre au service, dans de nombreuses écoles comme dans une grande partie de l'administration, on doit être de la même appartenance politique que son chef, surtout quand il est du parti au pouvoir, sous peine d'être mal traité.
Certains compromettent même leurs revenus en mélangeant politique et affaires. "J'ai du demander pardon à mes grands clients qui m'avaient abandonné pour avoir pris l'habitude de jouer de la musique louant mon parti politique dans mon magasin", fait savoir un commerçant de la commune Kiremba en province de Ngozi qui voyait ses clients passer devant chez lui avant d'aller acheter ailleurs. L'un d'eux lui a dit l'avoir laissé, car il mélangeait trop à son goût son parti politique et son commerce. Le commerçant affirme que ses revenus avaient chuté d'environ 30%.
Il n'est pas seul dans cette situation. Un autre habitant de la même commune, engagé comme recenseur pour l'enrôlement électoral, s'est fait emprisonner pour avoir signé du nom d'un chef de parti le reçu remis à la personne enrôlée et invité les gens à voter pour lui. Il a ainsi perdu les 250 $ qu'il devait recevoir pour ce travail.
Ailleurs, on voit de vieux paysans, des femmes avec des enfants déshydratés et affamés au dos, en train de danser pour les politiciens, des femmes qui passent tous les après-midi à répéter des chansons louant leurs partis politiques. De leur côté, certains jeunes se battent pour des partis politiques….

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