mardi 15 mars 2011

Nord-Kivu : la circulation est libre mais toujours risquée

Il y a deux ans, jour pour jour, l’armée rwandaise quittait la RD Congo après l'action commune menée avec les troupes congolaises pour traquer les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). Aujourd'hui, sur les routes du Nord Kivu, transporteurs et passagers ne payent plus de taxes aux rebelles mais l'insécurité est toujours présente.

Depuis six mois, les habitants de Goma peuvent à nouveau apprécier les fromages et yaourts de Lushebere. Une région verdoyante et vallonnée du territoire de Masisi avec de superbes et luxueuses fermes entourées de pâturages à perte de vue. Cette contrée, à 80 km à l’ouest de Goma au Nord-Kivu, est connue pour ses produits laitiers. Des denrées qui étaient rares pendant la guerre qui a opposé les Forces armées de la RD Congo (FARDC) aux rebelles du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de 2004 à 2009. L'action commune des armées congolaise et rwandaise pour traquer les rebelles des FDLR, qui s'est arrêtée le 25 février 2009, a mis fin à la guerre, avec la transformation du CNDP en parti politique. La paix retrouvée a progressivement permis la suppression des taxes parallèles sur les routes du Nord-Kivu. Depuis lors, la capitale provinciale de la province est approvisionnée en légumes, produits laitiers et matériaux de construction en provenance de Masisi. Les transporteurs sont les premiers bénéficiaires de cette libre circulation des personnes et des biens depuis la levée des barrières de Mushaki, à mi-chemin. Pendant la guerre, ce tronçon a été saucissonné entre les différentes forces en présence. C’est à Mushaki, l’ancienne position avancée du CNDP, que les rebelles prélevaient une taxe de 400 $ sur tout véhicule de commerçant alors que chaque passager s’acquittait d’une taxe de 10 à 15 $, par exemple, pour un sac de haricots. Selon un agent de l’Agence nationale de renseignements, ces taxes n’avaient que deux raisons d’être : "Alimenter la guerre et repérer les passagers espions".L’axe de la mortCependant, les FDLR n'ont pas disparu, ils n'ont fait que se disperser. À Kisuma (l’ancienne ligne de front entre le CNDP et la coalition Pareco-FDLR sur l’axe Goma-Masisi), la peur et une lassitude sans nom se lisent sur les visages des passagers à cause des attaques fréquentes des FDLR pour les dévaliser. Mais, malgré cette situation sécuritaire encore incertaine, la circulation sur l’axe Goma-Masisi est très dense. Des passagers avec leurs bagages montent, chaque matin, sur le toit des camions bariolés, bourrés de marchandises pour se rendre à Masisi, "le grenier du Nord-Kivu". Au-delà de la cité de Masisi en allant vers le territoire de Walikale, les civils sont encore victimes des représailles des FDLR pour "avoir collaboré avec les troupes rwandaises", déclare Juvénal Munubo, point focal au Nord-Kivu du Réseau de la société civile pour la réforme du secteur de la sécurité. C'est pourquoi, chaque vendredi à 14 heures, pour rejoindre le marché de Kibua, des centaines de paysans de plusieurs villages de Masisi, de Walikale et des commerçants venus de Goma et de sa région marchent à pied, entre Ouest-Masisi et Est-Walikale, encadrés par les jeeps des casques bleus de la mission de l’Onu. Le lendemain, à la même heure, ployant sous leurs biens, ils retournent à leur point de départ sous escorte onusienne. C'est la seule façon de se protéger des attaques des FDLR, car tout déplacement sans l'escorte des casques bleus fait courir un risque…


(Syfia Grands Lacs/RD Congo)

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